Les jeunes c'est l'avenir 2 (Feat Merry)

Je cligne rapidement des yeux trois ou quatre fois pour sortir de ma torpeur et suis le professeur qui s'enfonce dans la salle.

Nous entrons dans une salle marquée par un panneau sur lequel est inscrit "laboratoire de langue". La pièce est assez grande et serait extrêmement lumineuse s'il ne faisait pas nuit. Cela dit, c'est pas mal non plus de pouvoir contempler la lune et les étoiles pendant que l'on rêvasse en cours. Je me fais la réflexion que dans quelques semaines, les élèves pourront même observer l'aube se lever par cette baie vitrée...

Je secoue rapidement la tête pour me remettre les idées en place et contemple les rangées de tables vides face au bureau devant le table. 10 minutes avant la fin de la pause, au lieu de les gâcher en silence gênant nous devrions évoquer mon intervention... 
Voyant qu'après cette discussion pour le moins houleuse mon interlocuteur ne semble pas près à reprendre la main, je me lance:

"Vous recevez souvent des intervenants externes?"

- Non, pas vraiment...

Je m'appuie contre mon bureau en lui montrant une chaise, qui se trouve derrière mon assise.

- C'est ma première année, alors, j'ai eu la prévention policière au moins de novembre mais c'est tout... Vous l'avez déjà fait vous ?

La phrase a l'air de sonner un peu bizarre, mais je me force à me taire malgré un faible rougissement sur mes joues. Me calmer. Même si ce n'est pas évident.

"Fait?"

Je commençais à m'habituer à ses maladresses mais là, c'est tellement énorme que je ne pus m’empêcher de décocher un sourire légèrement moqueur. J'espère qu'il ne le prendra pas mal...

"Si j'ai déjà été intervenant vous voulez dire? Ça m'arrive rarement mais je l'ai déjà fait. Vous savez, je travaille au don du sang depuis son ouverture donc..."

Ne sachant pas comment finir cette phrase, je reprend:

"Vous... Vous voulez peut-être lire le speech que j'ai préparé? Je compte pas dire d'idioties mais parfois ça rassure les profs de vérifier avant."

- Oh non, c'est inutile... Je me doute que vous n'allez pas vous saborder tout seul.

Je lui souris un peu, puis je regarde la salle encore vide de tout élèves. Dans peu de temps ils viendront et ils prouveront à une personne supplémentaire que je n'ai aucune autorité. Ahlala... Comme j'ai hâte !

- Bon... Du coup...

Depuis que ça a ouvert ? Sérieux ? Oh le vieux. Il avait au moins 23 ans... et ça date quand même ce truc, non ?

- Vous avez quel âge en fait ? 200 ?

"Who! Doucement! Ne me faites pas plus viens que je ne le suis!"

Bon, je ne suis pas hyper-sensible concernant mon âge mais quand même, 200... 

"J'en aurai 194 cette année...." Je penche la tête sur le côté et lui fait un petit regard en dessous avant de lui demander, serrant les dents avec l'air légèrement gêné, "v... Vous trouvez vraiment que j'en fais 200?"

Je sais que c'est une réaction de gamin, mais je ressens soudain le besoin d'être rassuré sur la question.

Je le fixe en inclinant la tête, un peu surpris.

- Heum... Sans vouloir paraître je-sais-tout, vous êtes un vampire comme moi... Vous faîtes toujours 23 ans.

Et essayons d'oublier que, moi-même, j'en fait seulement 16. Oui, oublions le au mieux, je trouve ça déjà assez frustrant. Je n'ai d'ailleurs pas de miroirs chez moi en grande partie à cause de ça.

Mon visage s'illumine d'un sourire béat. Oui, c'est vrai, j'ai toujours l'apparence d'un beau jeune homme! Enfin, apparemment la notion de beauté est sujette à discussion... mais en tout cas celle de jeunesse ne l'est pas! C'est vrai que parfois, le poids des années me fait oublier ma constance extérieure...

Mais alors que je m'apprête à entamer une nouvelle phrase qui va sans doute à nouveau causer un quiproquo, la cloche du lycée me coupe la parole et résonne à 3 reprises indiquant aux élèves que la pause est fini.

Je tourne mon regard vers M.Gallagher:

"Il semblerait qu'il soit l'heure d'entrer en scène..."

"Oui, effectivement!"

J'affiche un sourire assez rassuré: je ne devrais plus dire de gaffes maintenant. Les élèves commencent à entrer, des "bonsoirs" se multiplient alors qu'ils passent en défigurant l'intervenant. Là, ils sont en train de se dire "trop bien, on va pas faire cours du coup !". J'ai hâte de leur donner leur devoir. Oh oui.

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La sonnerie retentit.

Un large sourire satisfait prend toute la place sur mon visage, c'est toujours le cas quand mes interventions se passent bien. Je ponctue de temps à autre les "Au revoir" que j'adresse aux élèves sortants d'un "Et surtout, n'oublier pas de donner! Pas parce que c'est obligatoire, mais parce que c'est important!".

En quelques secondes, tous les élèves ont disparu de la salle. Ont-ils fini les cours ou partent-ils vers une autre matière? Enfin, ce n'est pas très important...

A nouveau seul avec M.Gallagher, c'est à lui que j'adresse mon sourire. Certes, il n'était pas très doué avec moi au début, mais son rôle d'enseignant semble vraiment lui tenir à cœur et je ne peux m’empêcher de l'admirer un peu. 

Si tu le regardes comme ça sans rien dire, tu vas vraiment passer pour un type super louche!

"Euh... Mon intervention vous a convenu?"

Je relève les yeux vers lui à sa question, j'avais sentit son regard et un peu espéré qu'il finisse par parler.

- Oh, oui, vous avez été parfait.

Je lui souris sereinement, même si à l'intérieur c'est une guerre civile pour déterminé si ce que je viens de dire est un mensonge ou non.

- Vous voulez prendre un café ? La salle des professeurs est assez confortable.

Un café? Je n'aime pas spécialement le café mais étant donné que l'autre alternative consiste à rentrer chez moi et à attendre que mon coloc' rentre, couché en position fœtal en regardant le dernier épisode de vampire diaries - Ironie, quand tu nous tiens... - je m'empresse de hocher la tête.

"Je vous suis"

Je souris, ravi de cette petite pause dans ma dure journée d'humiliation, et ramasse les copies du devoir rendu par mes élèves. Il faut environ 3 minutes pour arriver à la salle des professeurs, j'espère juste que je ne vais pas les faire tomber en chemin. Je les serre fermement et sors de la salle de cours. Je n'aime pas le café. Je déteste le café. Je ne bois que du chocolat chaud. Mais franchement... "ça vous dit un chocolat chaud" c'est déjà un peu moins classe...

- Qu'est-ce qui vous a attiré dans les dons du sang ?

La meilleure question à poser à mon interlocuteur vampire, j'en suis sûr. Eh bien oui après tout, qu'est-ce qui attire un vampire se nourrissant de sang dans une entreprise prélevant du sang ? Qui sait, il va peut-être me surprendre.

Une fois la porte fermée derrière mon accompagnateur, garde du corps de mes propres idioties, je commence à le guider jusqu'à la salle, hésitant entre me concentrer sur mes copies, mes pieds, mes paroles, ou lui.

 
 
 
 
 
 

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